Newsletter "appartenir au vivant"

J'ai consacré ma première newsletter de janvier à un thème qui traverse l'ensemble de mes peintures : notre appartenance au vivant, à un ensemble aux multiples connexions qui nous lient aux autres formes de vie. 

 

Nouvelle série

Dans "rêves de forêt", l'humain se fond dans la nature, il se pare de fleurs ou d'écorce. Ses yeux sont clos, il ressent au-delà du visible. C'est un univers dans lequel l'humain fait un avec la nature qui l'entoure, il se souvient de son appartenance au vivant. La série se décline en plusieurs formats. Des formats carrés sont accompagnés d'un court texte poétique invitant à se laisser porter par le langage et l'image qui se nourrissent mutuellement. La série comprend également des formats A5 représentant les portraits des animaux présents dans les carrés poétiques avec un mot d'inspiration.

 

Zoom philo : Baptiste Morizot

Baptiste Morizot est un des philosophes contemporains qui m'inspire le plus. Il repense la relation entre l'humain et le monde vivant en s'appuyant sur l’interdépendance des êtres et des écosystèmes. Dans ses écrits, il appelle à porter sur les animaux et les autres êtres vivants, un regard d'intériorité à intériorité, à expérimenter l'altérité du vivant. 

Si on sort des dualités récurrentes exploitation-protection, civil-sauvage, diabolisation-sacralisation, une troisième voie est possible, celle d'une relation diplomatique avec le vivant. Dans son ouvrage "Les Diplomates", il propose de voir les animaux comme des partenaires avec lesquels l'humain doit apprendre à coexister dans un monde partagé, et non plus comme de simples objets d'étude ou comme des entités à exploiter. Il invite à s'éloigner de l'anthropocentrisme qui perçoit les autres êtres vivants en fonction de leur utilité ou de leur valeur pour l'homme.

Pareillement, mes peintures se fondent sur une vision d’altérité du vivant en mettant en présence l'humain et l'animal.

 

Focus créatif : la phantasia

Durant l'Antiquité, Aristote utilisait en grec le terme de phantasia pour décrire le fait qu'une chose nous apparaisse, qu'elle soit 'mise en lumière'. Il s'agit d'un mécanisme intermédiaire entre la perception et la raison. La notion de phantasia est complexe, elle englobe aussi bien les images mentales que des apparitions ou des images oniriques. Elle se traduit donc difficilement en français mais il est d'usage d'utiliser le terme imagination ou (re)présentation pour parler de la phantasia. 

Dans mon processus créatif, à l'origine, il y a souvent une vision, une image mentale qui jaillit comme un flash et ne nécessite pas d'action préalable. Cela part de tout et de rien, d'un nuage dans le ciel, d'une feuille d'automne collée sur une vitre, ou de l'intérieur, de cet espace en soi disponible aux idées, prêt à se laisser inspirer. A mon sens, l'imaginaire est un territoire sans limites qui me permet de réinventer et de réenchanter le monde, de donner vie à ce qui m'habite, à un univers profondément et intuitivement connecté, en  particulier aux animaux.

  

Inspiration artistique : Hayao Miyazaki

Passionnée de contes et de récits fantastiques, j'apprécie particulièrement les films du réalisateur japonais Hayao Miyazaki. Mordu de dessin depuis l'enfance, fasciné par les films d'animation et les bandes dessinées, Miyazaki choisit de se consacrer à sa vocation artistique après des études universitaires d'économie et de sciences politiques. Apprenant l'animation sur le terrain, il travaille de manière instinctive. Il dessine inlassablement, plonge dans ses rêves, invente ses histoires au fur et à mesure pour en découvrir le sens au fil du processus. 

Les films du réalisateur japonais offrent une réflexion sur la condition humaine à travers des mondes merveilleux qui touchent les enfants comme les adultes. L'art de Miyazaki est traversé par une forme de spiritualité issue de la culture ancestrale japonaise. Dans Mon voisin Totoro, on perçoit clairement la pensée shintoïste où l'humain n'est que l'un des éléments constitutifs d'une nature peuplée d'esprits protéiformes. Nausicaä de la Vallée du Vent porte également des valeurs animistes selon lesquelles ce que l'on entend par 'nature' constitue un tout interconnecté. L'héroïne de cette histoire cherche à comprendre les mystérieuses forêts toxiques et leurs créatures. Ces éléments du vivant ne sont pas passifs, ils sont capables d'évolution et de transformation. Princesse Mononoké est quant à lui un des films les plus sombres du réalisateur, c'est également mon préféré. En japonais, le titre du film, Mononoke Hime, signifie "la princesse des esprits ou divinités de la nature". Le film propose une réflexion sur la coexistence entre l'humain et la nature, et sur les conséquences de l'exploitation de la terre et de ses ressources. Le film prend fin entre doute et espoir à l'instar du futur de l'humanité. Sur le plan technique, c'est un des derniers films animés où les dessins ont été réalisés et peints à la main. 

A travers l'ensemble de son œuvre, Miyazaki s'interroge continuellement : dans quel monde voulons-nous vivre ? et que faisons-nous pour y contribuer ? 

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